Poupon Salopard

17 ANS. AUTEUR. PARIS. Fille.

hi

Poupon Salopard, parce que mon nom de famille ça fait cow-boy de l'Ouest.

J'en aurai mis finalement, du temps, pour cette présentation mais voilà. Je prends du temps, je prends mon temps, et je le laisse partir sans rien dire. Avec des yeux mornes dans la tête et rien sur les lèvres. Pourtant ! J'aime beaucoup la vie, je la cherche partout, et j'invite à en profiter tous les jours en remettant la mienne à demain - parce que c'est comme ça ; je ferai ça plus tard et à force, à 17 ans, je finis par ne rien savoir. Mais je sais écrire, au début ça ne demande rien, et après ouvre une porte sur un gouffre de complications. Mais on n'a pas peur, parce qu'on sait écrire, et parce qu'on aime plein de choses, toutes sortes de choses : on aime l'élégance chez Chanel, les parfums délicats, les bouches et les ongles rouges, les larges hanches et les petits seins, les longues jupes qui remontent, les shorts en cuir noir, les lignes longues et géométriques d'avant, bien avant, quand on était en 20 et en vin ; parce qu'on les hommes à poils, les hommes forts, les hommes à poil, les hommes gros comme des nuages, les hommes qui sentent le tabac, l'eau de cologne et l'alcool, les hommes vieux, les hommes à barbes, les hommes avec des pattes d'oie, avec des fossettes, avec des rides, avec de la mocheté sur la tronche et de la beauté dans le coeur, avec des rires bêtes, des blagues grasses et l'oeil mâle et tout particulièrement celui-là, qui est mort stupidement alors qu'il a gagné deux Pulitzer, qu'il aurait pu suicider, c'était de toute façon tout ce qu'on attendait de ce drogué, alcoolique, et homosexuel, là-bas, dans un Amérique puritaine qui ne l'accepte pas ; parce qu'on aime l'harmonica, la guitare et le piano à jouer debout, les chaussures dégueulassées par la marche, le beatnik, les mots trop forts qu'on ne comprend pas ; parce qu'on aime.

J'ai 17 ans, j'ai rien fait de la vie, et je l'attends. Je me dis qu'un jour je ferai comme lui, j'arrêterai décrire et je partirai, et on écrira des lettres en parlant de moi parce qu'on veut faire encore vivre l'amie qui n'est pas là - parce que je serai pas là, je serai dans les années 30 de Jérusalem, je serai un otage des pirates de Somalie, je serai en train de crever de faim en me putant au Niger, ou au Nigeria je ne sais plus, je serai dans un bus dans lequel on ne peut pas s'asseoir en Inde, je serai avec un homme aux dents sales de Singapour et je l'aimerai pas, je serai perdue, je serai en train de danser à Cuba, t'sais que là-bas, il y a un café, ou un bar, je sais plus, qui a rouvert où Hemingway trainait beaucoup, t'sais que là-bas, soit t'es pauvre, soit t'es riche, t'as pas d'entre-deux, là-bas je serai à un bar en extérieur, avec des poutres avec plein de feuilles, je serai en train de danser et il y aura cet homme un peu rond, comme je les aime parce que ça rassure, cet homme aux cheveux qui reculent mais aussi qui ondulent comme chevaux très noirs dans la lagune, avec des rides, des fossettes, une moustache ridicule, des grands yeux de poisson bleu, ce sera un homme pas très grand, voire petite, même plus petit que moi, et je le connaitrai pas, et il me regardera danser depuis début dans la soirée dans ma robe légère et blanche, celle de Marylin, et moi je m'en fous, je le connais pas, mais je l'aime, je suis amoureuse, je le connais pas, je sais pas son nom, et on fera durer la nuit comme des fous en criant ; je serai là-bas, je dormirai pas, je traverserai les United States of America de gauche à droite, et je me noierai dans l'Atlantique. Puis je rentrerai, et je serai une belle femme.

Mais pour le moment ; j'ai 17 ans, J'ai rien fait de la vie, et je l'attends... je l'attends en vous lisant, et en me persuadant qu'écrire c'est déchirer quelque chose du corps pour le mettre sous les yeux de quelqu'un, qui regardera avec des yeux écquarquillés, écoeurés, perplexes, ou qui qui regardera pas ; et se présenter c'est la même chose, c'est déchirer quelque chose de soi, et le montrer, c'est commme si tu t'ouvrais, mais vraiment, pour de vrai, c'est présenter, parler de soi, c'est prendre la peau entre tes deux seins - moi j'en n'ai pas mais c'est pareil - et les ouvrir comme deux grandes portes. Parler de ce que t'écris, et parler de toi en écrivant, ça peut être la même chose.

En t'embrassant.

Amen.

PS : Nuit Parisienne, si tu passes par là : je voudrais te dire que j'ai hâte de te lire, et que j'attendrai ça le temps qu'il faudra.

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